Comment voir le célibat ?

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Comment voir le célibat ? Pourquoi cette souffrance-là est si difficile à évoquer ? Pourquoi, quand on se décide à en parler, engendre-t-elle des débats aussi enflammés ? Isaline, à travers cet article, nous propose une belle réflexion sur le célibat ! Bonne lecture 🙂 

Vous trouverez pas mal d’articles sur le célibat sur les sites, blogs, journaux destinés à un public chrétien. Pas autant que sur le mariage, mais beaucoup. Ces articles qui parlent du célibat sont souvent écrits à destination des célibataires eux-mêmes, et les invitent à voir plus loin que la frustration de leur état présent, à faire confiance à Dieu, à adopter une bonne attitude, à ne pas tomber dans l’amertume… Ce sont de bons conseils. Mais quand on souffre, qu’on se sent seul, rejeté par une personne qui nous plaît, ou méprisé par les autres, les bons conseils ne sont pas toujours faciles à accepter. Même venant d’un ami ou d’une personne sage et bien intentionnée. C’est difficile d’écrire sur le célibat parce que le sujet est tellement sensible.

Au risque d’enfoncer une porte ouverte, peut-on se poser cinq minutes la question : pourquoi est-ce un sujet aussi sensible ?

Les gens en souffrent, certes. Mais ce n’est pas la seule source de souffrance dans la vie terrestre, et d’une façon générale on n’a pas trop de problèmes entre chrétiens à parler de la souffrance – en parler c’est une chose, l’accepter c’en est une autre, certes. Mais en parler, ça va, on y arrive.

Pourquoi cette souffrance-là est si difficile à évoquer ? Pourquoi, quand on se décide à en parler, engendre-t-elle des débats aussi enflammés ?

Je crois qu’on a du mal à regarder le célibat en face, avec le regard de Dieu. Son propre célibat, si on est concerné, ou celui des autres. Ça nous fait peur. Comment un Dieu bon peut-il nous laisser dans une telle misère affective ? On pense au récit de la création de l’homme, en Genèse 2, et on se répète « il n’est pas bon que l’homme soit seul », c’est Dieu qui l’a dit ! Pourquoi alors ne donne-t-il pas à chacun une compagne ou un compagnon ?

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Trois réponses, qui se cumulent :

  • Aucune des choses « bonnes » de la Création ne peut être parfaitement vécue par tous les hommes dans le monde que nous connaissons tant qu’il est marqué par le péché
  • Dieu peut volontairement nous placer dans des conditions plus difficiles pour nous éprouver et nous apprendre à marcher en nous appuyant sur Lui seul
  • Concernant le célibat spécifiquement, l’enseignement du Nouveau Testament ne nous permet pas d’affirmer que le mariage est nécessairement un meilleur état pour l’homme que le célibat.

Oh, pourtant, on aimerait bien le trouver, ce verset qui dirait que le mariage est forcément meilleur pour nous. On aimerait bien s’y cramponner comme à un fétiche (et c’est un peu ce qu’on fait avec Genèse 2) et se persuader que Dieu nous donnera « ce que notre cœur désire » (tiens, un autre verset qui joue parfois le rôle de fétiche, en Jérémie 29, 11).

Quel est le problème ? Je ne suis pas assez calée en théologie pour apporter une réponse complète sur ce sujet, mais mon expérience personnelle me conduit à penser qu’on a fait du mariage, de la vie en couple, une idole, un des buts ultimes à rechercher sans lesquels la vie sur terre ne vaut pas la peine d’être vécue. La culture dans laquelle nous baignons, même si elle est très critique par rapport à l’institution du mariage, place la vie de couple, les sentiments amoureux, sur un piédestal. Et nous, chrétiens, nous avons bien du mal à ne pas nous laisser entraîner par ce raz-de-marée culturel.

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Si on plaçait les choses au bon endroit, pourtant, si on donnait à Dieu sa juste place dans nos vies, si on lui ouvrait notre cœur, on comprendrait sans doute que ce besoin pressant d’être connu, compris, accepté, aimé, soutenu, plus jamais seul, ce besoin pointe vers Lui. Et ne sera pleinement comblé que dans la vie éternelle lorsque nous serons « pour toujours avec le Seigneur » (1 Thessaloniciens 4,17).

Pourquoi le célibat est-il si piètrement considéré dans nos églises ? Comme une situation peu enviable, ou forcément transitoire, en tout cas pas un état auquel aspirer… Peut-être que l’existence même du célibat, de ces personnes à qui il semble « manquer quelque chose » (ou plutôt quelqu’un) nous renvoie à l’imperfection de notre état présent, sur terre, dans l’attente de l’accomplissement de toutes les choses promises, au milieu d’un monde encore soumis au péché et à toutes ses conséquences. Nous aimons regarder à nos familles heureuses et unies, aux mariages puis aux enfants, petits-enfants. Nous aimons – et c’est naturel – reconstituer autour de nous quelque chose qui nous parle du ciel, d’un bonheur parfait, protégé. Nous remercions le Seigneur pour nos familles et nous prions pour qu’il les préserve et les bénisse, pour que les jeunes se marient, que des enfants naissent, puis grandissent bien, et devenus adultes se marient à leur tour et ainsi de suite. Les célibataires ne rentrent pas bien dans ce schéma. Ils sont la dissonance dans l’accord parfait. Bon, les divorces et les deuils, les stérilités et les maladies, aussi, mais le célibataire… il a quelque chose de spécialement incompréhensible et frustrant.

Pourtant si on recule de quelques pas pour remettre les choses en perspective, les biais de notre perception sont bien présents. Je n’accuse personne : je suis la première à avoir ce biais dans ma vision de mon propre état de célibataire et de celui des autres autour de moi. Instinctivement, j’ai tendance à penser qu’on est forcément « mieux » quand on est en couple. On peut faire face à d’autres problèmes, certes, mais un besoin fondamental est comblé, et sur cette base de vie on peut édifier le reste. Non ?

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Non… En l’écrivant je vois à quel point ce raisonnement est bancal. Le seul fondement solide sur lequel édifier sa vie, c’est Jésus ; c’est la seule base qui ne peut pas nous faire défaut. A considérer le mariage comme un élément si central de la vie, et même, souvent, comme un « préalable » à beaucoup d’autres choses, il me semble qu’on lui donne une place trop importante, qu’il n’aurait jamais dû occuper. En lui donnant une place si importante, on nourrit notre insatisfaction à tous : célibataires à qui il « manque quelque chose », et couples mariés aussi, lorsque le mariage n’apporte pas toute la satisfaction qu’on en attendait, ou bien est plus difficile que prévu à faire fonctionner.

Donc ce que j’aimerais vous laisser sur le cœur, c’est cette supplication pour une place plus juste du mariage et du célibat dans notre inconscient collectif. J’y vois plusieurs avantages concrets pour notre marche chrétienne, en communauté et personnellement :

  • se protéger de l’insatisfaction qui naît d’attentes trop élevées vis-à-vis de son conjoint ou futur conjoint,
  • épargner aux jeunes la pression sociale qui vient lorsque la culture familiale ou d’église manifeste que la normalité, c’est le couple, et éviter ainsi qu’ils s’engagent précipitamment dans des relations pour échapper à cette pression, ou même qu’ils quittent l’église à cause de cette pression,
  • mieux considérer et donc mieux accueillir l’étranger à l’histoire familiale compliquée,
  • encourager les personnes à s’investir dans la communauté non pas comme un pis-aller parce qu’ils n’ont pas de famille mais comme un privilège, et restaurer ainsi la place et la dignité des adultes célibataires dans l’église.

Que le Dieu de toute grâce nous aide à voir comme lui voit et à aimer comme lui aime.

Et vous ? Comment voyez vous le célibat ? Quelle place a pour vous le mariage ?

Article écrit par Isaline du blog HillsongNutella

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